par Molly Benn, le 29 Janvier 2013
Akina Books est une maison d’édition indépendante, créée et gérée par Alex Bocchetto et Valentina Abenavoli. Elle publie des livres photographiques en édition limitée. Et comme j’aime les éditeurs indépendants, les livres et la photographie, voici une petite interview pour vous faire découvrir leur travail.
Age13 : Pourquoi avez-vous créé votre propre maison d’édition ?
Akina Books : Nous avons toujours été intéressé par les livres de photo, mais pas en tant que collectionneurs. Nous aimons être entouré de livres, nous aimons les manipuler, nous aimons en créer. Nous et les livres photo, c’est une véritable histoire d’amour. Chaque fois que tu ouvres un livre de photographie, tu plonges dans une réalité parallèle et ça te mène ailleurs. C’est une façon différente de voir les images. L’image existe en elle-même mais aussi dans une narration. On aime les livres qui ont plusieurs niveaux de lecture, ceux qui se révèlent petit à petit. Nous sommes submergés d’images à l’écran et par leur accumulation elles deviennent inoffensives. Alors que sur papier, l’expérience est différente.
Nous avons entrepris de monter une maison d’édition après avoir choisi le livre photographique comme medium pour raconter des histoires. Akina Books s’est lancé en tant que maison d’artistes autogérée. On éditait nos propres travaux sans contacts ni expérience. Il a fallut trouver où imprimer, comment construire et distribuer nos livres. C’est une expérience passionnante ! Maintenant, ça y est, ça roule ! Mais il nous reste toujours tout un monde à découvrir et de nombreuses expériences à vivre !
Age13 : Pourquoi faire des livres ?
A-B : Les livres survivront à la révolution numérique. Les amoureux du livres liront toujours et continueront d’acheter des livres. Et comme nous sommes passionnés de photographie, nous avons décidé d’aller un peu plus loin que la simple édition de livres. On expérimente des nouvelles formes de mise en page, de graphisme, de papiers, des techniques d’impressions et de reliure artisanale. On essaye d’avoir un contrôle total sur tout le processus, mais cela demande beaucoup de compétences. Nous en apprenons tous les jours. On est fasciné par toutes les anciennes techniques d’impressions. Notre prochain objectif est d’utiliser la typographie et la gravure sur bois dans nos ouvrages. Les anciennes techniques d’impression donne une âme bien différente aux pages d’un livre. Il y a quelque chose d’intime et de personnel, de spécial et d’unique.
Age13 : Qu’est-ce que vous aimez dans la photographie et les arts visuels ?
A-B : L’être humain préfère la vue à tous les autres sens. La vue apporte une connaissance importante du monde dans lequel on vit. Une image peut être utilisée en tant que document, même si elle peut être détournée. La photographie et les arts visuels en général sont les moyens les plus démocratiques pour aborder la réalité. Ils permettent de décrire qui nous sommes et ont le pouvoir de nous changer. Si l’on compare la photographie à un texte, la photo intègre des éléments que le photographe ne contrôle pas forcément et dont il n’est pas forcément conscient. Aussi, une photographie est plus incomplète qu’un film, elle laisse la place à l’imagination. Dans le cas d’un livre photographique, la photographie nous permet de raconter une histoire avec une série d’images, et pas forcément de façon linéaire.
Cirkus
Age13 : Comment choisissez vous les livres que vous publiez ?
A-B : Akina Books reçoit des nouvelles propositions chaque jour. Certaines d’entre elles attirent notre attention. D’autres moins. Parfois, nous devons adapter le projet photographique au format du livre, et parfois nous tombons sur des projets « prêt-à-publier ».
C’est ce qui s’est passé avec Joze Suhaldonik, un photographe slovène. Son livre Cirkus qui fait partie de notre collection Eclisse, a été édité et imprimé en quelques jours. La collaboration fut parfaite ! Circkus nous révèle l’histoire d’une ville errante, avec sa propre histoire, ses propres traditions et ses propres règles. Cette communauté, à la fois anachronique et pourtant autosuffisante, n’a pas besoin d’un public pour s’exprimer. Cirkus est un photo-zine qui se lit comme une performance.
Fallen Empire, notre premier livre, est une histoire d’amour et de décadence. Né de notre curiosité, il a pris forme grâce à l’absence de point de vue critique sur la ville dans laquelle nous vivons. Nous y avons ajouté un soupçon d’autobiographie. Nous avons travaillé pendant deux ans sur ce projet, il a vraiment grandi avec nous.
Et d’autres fois, nous sommes simplement tombé amoureux de projets que l’on trouvait sur internet, comme 365 de Alexander Aksakov, un photographe émergent qui a réalisé son projet en un an durant son service militaire en Russie. C’est un portrait formidable de toute une génération. On va bientôt sortir le livre.
© Alexander Aksakov
Age13 : Pour quoi vous battez-vous ?
A-B : »I’m a lover not a fighter… » comme le dit cette chanson blues.
Les combats ne sont plus à la mode dans notre monde occidental.
Nous pensons qu’un des objectifs de l’art est de proposer des alternatives, de multiplier les points de vue. Si l’art est une marchandise, elle doit au moins être utile, et si elle n’est que divertissement, on préfère regarder un film de kung-fu.