La photographie de paparazzi s’inscrit dans une histoire, un âge d’or qui est aussi celui de la presse à scandale. Loin de la noblesse du grand reporter de guerre, le chasseur de scoop est pris dans une image ambiguë : celle d’un homme caché pendant des journées entières, à l’affût d’un cliché volé à une star, mais aussi celle d’un parasite de charme vivant en périphérie des célébrités dont il se nourrit. D’où vient donc le paparazzi ?
L’acte de naissance officiel du paparazzi date de 1960, dans le film de Federico Fellini, « la Dolce Vita ». C’est un amalgame qui a associé son image à l’élégance désabusée de Marcello Mastroianni. Car Paparazzo est en fait le nom du photographe (joué par Walter Santesso) qui accompagne Marcello dans ses poursuites nocturnes. Le personnage est devenu si emblématique que son nom sera désormais le terme utilisé pour désigner ces photographes qui traquent la vie privée des stars. L’étymologie du terme est tiraillée entre plusieurs origines : avouons un penchant pour celle de l’épouse du Maestro Fellini, Giuletta Masina. Elle présente le mot paparazzi comme la contraction de papatacci (petits moustiques au bourdonnement irritant) et ragazzi (jeunes hommes en italien).
« La Dolce Vita »
« La Dolce Vita » serait donc l’acte fondateur du « paparazzisme » ? Plutôt une sorte d’officialisation. Car la fin du film déploie une longue scène d’orgie dans une villa de la haute bourgeoisie romaine, fortement inspirée par un fait bien réel, survenu deux ans auparavant et publié dans l’hebdomadaire italien L’Espresso (novembre 1958). Soirée mondaine au night-club, le Pipistrello : pour le plus grand plaisir de l’assistance, une jeune femme entame un strip-tease photographié par Tazio Secchiaroli. Le reportage, intitulé « la Turca Desnuda » (d’après la jeune danseuse turque, Aiché Nana) fera scandale. La censure recouvre de ses rectangles noirs parties intimes, gestes sans équivoques et regards identificateurs.
Tazio Secchiaroli serait donc le premier paparazzi ? A voir. Si le paparazzi est à la fois le photographe qui exhibe les potins des célébrités mais aussi celui qui met les faits divers à la une, alors, le photographe américain Weegee pourrait aussi en être une figure d’origine. Toujours au bon moment au bon endroit, il dispose dans sa voiture d’un émetteur radio branché sur les fréquences de la police, ce qui lui permet d’être le premier présent sur les lieux du crime ou d’une arrestation spectaculaire. Sa carrière commence dès les années 1920 et ses photos seront publiées dans les plus grands journaux américains.
Portrait de Weegee
S’il n’est donc pas si simple de dater la naissance du paparazzi, il semblerait que son existence soit liée à la vitalité de la presse en général, presse people et presse à scandale en particulier. Que deviendrait alors notre paparazzi dans le contexte actuel de déclin de la presse écrite ? Et bien sa mort pourrait à son tour venir alimenter la presse dans laquelle il a si souvent publié ses photos : Daniele Lo Presti était un paparazzi s’étant attiré la haine de nombreuses stars à qui il avait volé des clichés. En février 2013, alors qu’il faisait son jogging, il a été abattu d’une balle dans la tête. De cette exécution, les clichés manquent : les paparazzis sont arrivés trop tard.
Daniele Le Presti
