Quelles traces nos émotions laissent-elles dans les lieux que nous habitons ou que nous traversons ? Nos maisons de toujours ou nos maisons d’un jour, Cody Bratt les a photographié lors de ses voyages en Californie et au Nevada et les a associé avec des portraits qui semblent tout droit sortis de films noirs. Ainsi est née sa série « Love We Leave Behind ».
| Toutes les photographies, « Love We Leave Behind » © Cody Bratt
Avec pour seule distraction les paysages californiens décorés par les ruines de la Ruée vers l’Or et des motels décrépis, Cody Bratt, photographe basé à San Francisco, s’est mis très tôt à y imaginer des histoires fictionnelles qui, au fil des années, ont tourné à l’obsession photographique : « Ces espaces qui furent tant aimés et habités autrefois, mais qui, aujourd’hui, sont comme perdus dans le temps, sont depuis le début un thème récurrent dans mon travail. En 2014, j’ai commencé à les associer avec des portraits plus fictifs pour voir dans quelle mesure notre vie émotionnelle peut laisser une marque sur les espaces que nous habitons et traversons, et si ces espaces avaient éventuellement une durée de vie propre. », nous raconte-t-il par email.
Motels, stations d’essence et autres lieux de passages portent nos marques, sont comme usés par la multiplicité des personnes qui les habitent, parfois juste pour une heure ou une nuit. « Ce sont des endroits que nous habitons temporairement, mais dans lesquels nous avons souvent des expériences émotionnelles intenses, ajoute-t-il. Une rencontre nocturne clandestine avec son amant, des vacances en famille, un nouveau départ dans la vie. Ces lieux sont souvent profondément enfoncés dans nos souvenirs, bien que nous les quittons rapidement physiquement. Quels reliquats de nous-mêmes avons-nous laissé derrière nous, et comment ces espaces demeurent-ils inscrits dans le récit de nos souvenirs ? »
« Love We Leave Behind » est un document-fiction, un film sans son ni mouvement, dont les protagonistes ne pourraient bien n’être que nous-mêmes : « peut-être sont-ils réels ou imaginaires, suggère Cody. Peut-être sont-ils tous le même personnage. Peut-être sont-ils des émotions personnifiées. Peut-être sont-ils les spectateurs. »
Cody Bratt est un photographe américain basé à San Fransisco. « Love We Leave Behind » sera publiée aux Éditions Fraction à l’automne 2017. Son site Internet : codybratt.com.