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*Le titre est mensonger, on prendra le train a un moment.

Une fièvre d’expositions nous saisit : certaines sont passionnantes, d’autres attachantes. Elles nous questionnent, nous stimulent ou nous comblent. Ouvrons grand les yeux.

A OAI13, on n’a pas peur des femmes photographes et on l’a prouvé à plusieurs reprises. Alors, le titre un peu ronflant de l’exposition-fleuve « Qui a peur des femmes photographes ? » ne nous impressionne pas outre-mesure. Il correspond à deux expositions qui couvrent deux périodes : 1839-1918 au Musée de l’Orangerie et 1918-1945 au Musée d’Orsay. Deux expositions militantes puisqu’il s’agit de rééquilibrer une histoire de la photographie trop ignorante de l’apport des photographes femmes.

Voir aussi : « Les Femmes sont-elles sous représentées dans l’histoire de la photo ?

Et il faut bien le dire, de formidables découvertes vous attendent (surtout au Musée de l’Orangerie). Des images qui entreront immédiatement dans les livres d’histoire. Pourtant, à la longue, la problématique lasse un peu. Car on a envie de voir des photos sans forcément se poser la question du sexe de l’auteur(e). Et on aurait peut-être aimé qu’un troisième lieu parisien analyse l’histoire récente et la transposition de cette question dans la photographie contemporaine. Ou bien serait-ce qu’aujourd’hui, la question ne se pose plus ?



Vue dans l’exposition , une vilaine bande dessinée se moque de la femme photographe
Vue dans l’exposition , une vilaine bande dessinée se moque de la femme photographe


A quelques pas, le Jeu de Paume fait dans la légèreté avec l’aérien et prolifique Philippe Halsman. En guests-stars, Marilyn et Salvador Dali. Beaucoup de petites curiosités, des planches-contact qui permettent de suivre le making-of de prises de vues mythiques (celle de Dali en suspension) et de comprendre de l’intérieur le choix des clichés.



Philippe Halsmann
Philippe Halsmann


C’est au BAL que se tient l’une des expos les plus passionnantes du moment. Dust, Histoires de poussière, prend pour point de départ la fameuse photo de Marcel Duchamp et Man Ray, Élevage de poussière. Mais pour le commissaire, David Campany, la poussière n’est pas seulement un thème, un fil rouge qui devrait se retrouver dans chaque photo présentée. Elle est une manière d’avancer dans l’exposition : à travers des rapprochements audacieux et des ensembles inattendus, c’est le sens qui se trouve disséminé, saupoudré, pulvérisé. Sur la photo ci-dessous, c’est l’immeuble des usines Kodak (et avec lui, toute une ère de la photographie) qui tombe en poussière. Une exposition qui comble le regard autant qu’elle crée de l’intelligence.



Robert Burley, Demolition of buildings 64 et 69, Kodak Park, Rochester, Courtesy de l’artiste et du Musée Nicéphore Niépce
Robert Burley, Demolition of buildings 64 et 69, Kodak Park, Rochester, Courtesy de l’artiste et du Musée Nicéphore Niépce


Cette intelligence de la photographie peine parfois à apparaître dans les manifestations d’art contemporain dans lesquelles elle semble toujours chercher sa place. Plutôt flottante au Salon de la Jeune Création de Montrouge, totalement débridée dans l’expo de Mathis Collins au Palais de Tokyo où la photo devient sculpture ornée de chichas diverses. La photo ne saurait nuire à la santé …



Mathis Collins, photo d’exposition, détail
Mathis Collins, photo d’exposition, détail


Difficile de faire un choix parmi les 137 expositions des Rencontres Photographiques du Xème. Sachez seulement qu’il faut vous attendre à en voir partout, y compris dans les arbres et jusque dans l’eau du canal Saint-Martin. Et tant qu’à être près de la Gare de l’Est, sautez donc dans un train pour le Centre Pompidou de Metz. C’est le plus court chemin vers le new-York des années 70 et la Factory de Warhol. Une expo pleine de rock et de photos de l’effervescence de ce lieu, avec un Warhol photographe toujours dérangeant.



David MC Cabe, Andy dans les toilettes, La Factory, New York, hiver 1964-65
David MC Cabe, Andy dans les toilettes, La Factory, New York, hiver 1964-65


Plus calme, l’exposition Arborescences à la Galerie Michèle Chomette (jusqu’au 31 octobre), qui n’a pas son pareil pour mettre en regard une photo contemporaine et une photo du XIXème. Et à chaque fois, c’est le regard qui sort gagnant d’un tel rapprochement. Montez-les étages et poussez la porte, quelques chefs-d’oeuvre vous y attendent.



> PASCAL AMOYEL, 2013  NERIS-LES-BAINS, série Levés d’Ouest > Exposition Arborescences 1850-2015, galerie Michèle Chomette, Paris
> PASCAL AMOYEL, 2013 NERIS-LES-BAINS, série Levés d’Ouest – Exposition Arborescences 1850-2015, galerie Michèle Chomette, Paris


Enfin, avouez qu’il est rare de voir des photos au milieu des rugissements et des pépiements d’oiseaux exotiques. Cette jungle sonore vous accompagnera tout au long de l’attachante expo Doisneau au Muséum, dans la Grande Galerie de l’Évolution. Un reportage jamais publié qui montre un Doisneau concentré sur son sujet, très peu porté sur l’anecdote mais plutôt appliqué à construire des photos dans lesquelles il met en relation l’humain et le foisonnement du vivant. Avec un regard complètement différent lorsqu’il revient sur ces mêmes lieux, en 1990. La légende d’une photo m’a fait réfléchir : « une nouvelle boîte d’insectes donnait au professeur Jeannel une joie toujours renouvelée ». Voilà, il suffit de remplacer insectes par photos.



copyright Atelier Robert Doisneau, Le professeur Paul Budker contemplant des bébés requins - 1943
copyright Atelier Robert Doisneau, Le professeur Paul Budker contemplant des bébés requins – 1943