Dans son roman photo Amitié Eternelle , Anouck Durand utilise des fonds photographiques privés et des images de propagande pour nous narrer l’Albanie communiste. L’artiste nous raconte surtout le pouvoir narratif de l’image. Avec le chercheur Gilles de Rapper, elle est partie à la rencontre des photographes de propagande du régime d’Enver Hoxha. Ce livre raconte alors l’envers de la dictature albanaise par la voix de ceux qui en ont fait la propagande.
| par Camille Perissé
© Refik Veseli
L’auteur
Anouck Durand est une artiste française. Son travail s’interroge sur les relations entre photographie et narration. Comment construire un récit par la photographie ? Telle la question qu’elle explore dès ses premiers romans photos, comme Comment je me suis sauvée? fait à partir d’images des années 30 achetées sur Ebay.
© Wang Qingsheng et Shu Chunxi, Collection IISG et Landsberger, International Institute of Social History
En collaboration avec l’anthropologue Gilles de Rapper, Anouck Durand multiplie les colloques et les publications pour comprendre la problématique de la photographie dans l’Albanie communiste. Entre propagande et photographie amateur, quelle est la place et la fonction de l’image en temps de dictature? Ce livre est l’aboutissement et la synthèse poétique et non sans humour, d’une démarche à mi chemin entre l’universitaire et l’artistique.
Le livre
Amitié éternelle est un roman photo historique mais pas moins ludique puisqu’il raconte l’histoire de la photo albanaise, par la photo albanaise. À partir d’images inédites et de témoignages, Anouck Durand se faufile dans la peau de Refik Vesili, photographe de propagande albanais décédé en 2002. Ainsi, à travers des textes courts et incisifs, nous suivons son voyage de formation en Chine avec deux de ses compatriotes, Pleurat Sulo et Katjusha Kumi. Parce que c’est bien l’amitié sino-albanaise qui pousse Hoxha à envoyer ses photographes apprendre la trichromie alors même que les pellicules couleurs sont disponibles. À moins que l’amitié éternelle dont parle le titre ne soit celle qui unit Refik à Mosha Mandil, photographe juif dont Anouck Durand reconstitue l’album de famille.
Photos : © United States Holocaust Memorial Museum, courtesy of Gavra Mandil
Illustrations : © Pren Toçi, 1979
L’ouvrage d’Anouck Durand nous pousse alors à lire les images, à les faire dialoguer. La narration qu’il offre nous permet de mesurer le poids de la photographie. L’extrême documentation historique est allégée par le point de vue fictionnel du vrai photographe Refik Vesili. Cette personnalisation du récit à travers Refik, permet au lecteur de s’identifier et de mesurer la valeur discursive de la photographie, qu’elle soit de propagande ou de famille.
© Petrit Kumi
Trouver le livre :
Amitié Éternelle , Anouck Durand
Edition Xavier Barral
25 euros
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© Ilo Vero Golloshi / fonds Pleurat Sulo.