Du marquage des esclaves dans l’Antiquité aux podiums des marques de vêtements de luxe, le tatouage a parcouru un long chemin en plus de 2 000 ans. Aujourd’hui, il a plusieurs visages : signe d’appartenance à un gang, accessoire de mode, manière d’immortaliser des moments de vie, tatouage médical ou signe d’appartenance ethnique. La photographie nous aide à interpréter ces différents tatouages en leur associant des styles spécifiques de prise de vue.
► ► ► Cet article fait partie du dossier Tatouages, histoires et regards
La photographie criminelle
Entre les années 1960 et 1980, Arkady Bronnikov a parcouru les prisons pour photographier les criminels russes et leurs tatouages. Le criminologue travaillait pour le ministère de l’Intérieur russe : il avait pour mission d’identifier tous les tatouages et leur signification afin de décrypter le langage des fraternités. Les photographies d’Arkady Bronnikov ont donc pour fonction de détailler les tatouages. Elles reprennent les codes de la photographie criminelle, c’est-à-dire des images de face et de profil.
©Arkady Bronnikov
©Arkady Bronnikov
©Arkady Bronnikov
Carlos Alvarez Montero est un photographe mexicain ayant beaucoup travaillé sur les gangs. Dans sa série Scars, il fait le portrait de personnes qui se sont fait tatouer le visage. Parmi les modèles, on retrouve quelques membres de gangs mais ce n’est pas le cas de tous. Néanmoins, le type de portraits — de face et de profil — nous pousse tout de suite à les assimiler à des criminels.
©Carlos Alvarez
©Carlos Alvarez
©Carlos Alvarez
La photographie documentaire
Le tatouage est également un signe d’appartenance ethnique dans certaines cultures. Le photographe Jeff Bauche a suivi des femmes de la tribu des Apatanis, peuple du nord-est de l’Inde. Dans cette culture, le tatouage était utilisé pour marquer la beauté des femmes. Jeff Bauche, lui, a décidé de photographier ces femmes dans leurs vieux jours. Le style d’image est fidèle à la photographie documentaire : en lumière naturelle et cadre large, on situe le sujet dans son environnement.
©Jeff Bauche
©Jeff Bauche
La photographie de mode
La photographie de mode s’est récemment mise à représenter des tatoués dans divers registres :
- – le streetstyle : reprenant le concept du célèbre blogueur mode The Sartorialist, qui est de photographier les gens qui ont du style dans la rue, le Tattoorialist s’est mis en tête de réaliser un tour de France des tatoués. Il applique à ses photographies le « style streetstyle », c’est-à-dire une image sous lumière naturelle, des portraits en pied puis des détails.
By the tattoorialist
By the tattoorialist
- – le lookbook : certaines marques choisissent maintenant pour leur lookbook, accessoire commercial de marketing d’une nouvelle collection, des mannequins tatoués. Pour sa collection automne-hiver 2014, la maison Kitsuné faisait appel au mannequin américain Cole Mohr. Le tatouage fait aussi partie de l’identité de la marque The Kooples.
The Kooples
The Kooples
Kitsune
Kitsune
- – la série de mode : Enfin, le tatouage est représenté jusque dans des séries de mode pour des grands magazines ou des grandes marques. Il n’est désormais plus nécessaire de présenter Zombie Boy, ce mannequin entièrement tatoué qui a fait le tour des podiums et des photoshoots. Il a notamment été l’égérie de marques comme Mugler, Rocawear ou encore l’Oréal.
Rocawear
Mugler
Le tatouage et ses différents rôles est photographié dans des styles et registres différents aidant à sa compréhension : à la photographie criminelle ses criminels, à la photographie documentaire ses tribus en terres inconnues, à la mode ses mannequins tatoués. Mais que se passerait-il si l’on mélangeait ces filtres de compréhension ? Cheyenne Randall, en empruntant des photos historiques de paparazzi de célébrités politiques et en leur apposant des tatouages, nous fait confondre le couple princier britannique William et Kate avec un couple de hipsters. On se quitte sur ce mélange des genres, cheveux violets au vent et lunettes carrés sur le bout du nez.