Kate Kornberg est une jeune artiste Américaine basée à Paris. Avec sa série Becoming Donnatella, elle décrit la transformation de Michael en Donnatella, figure du milieu Drag Queen. A travers la chronologie des images, la photographe raconte la métamorphose et le passage d’une identité sexuelle à une autre.
| Interview par Camille Périssé, toutes les photos © Kate Kornberg
► ► ► Cet article fait partie du dossier : LGBTI, à l’aube de 2015
Quelle est l’histoire derrière « Becoming Donnatella » ? Pourquoi avoir choisi Donnatella Howe, figure de la scène Drag Queen de Seattle?
L’histoire de cette série est simple. Je passais le week-end à Portland avec des amis qui connaissaient beaucoup de gens de la scène Drag Queen. Nous avons passé du temps avec leur ami Michael dans sa chambre d’hôtel pendant qu’il se préparait pour sa performance. J’avais mon appareil avec moi, je lui ai demandé si je pouvais photographier sa transformation et il a accepté. J’ai longtemps été intéressée par l’idée du rituel privé en opposition au rituel public.
Que vous a-t-elle dit sur sa vie?
Je voulais être la plus discrète possible pendant que je photographiais car je voulais que la scène se révèle d’elle-même, sans mon intervention. Pour moi, ces images ne racontent pas une histoire dans sa globalité, mais plutôt ce moment précis de transition entre deux identités. Pour capter cela, j’ai préféré ne pas en savoir trop sur sa vie à l’extérieur de cette chambre d’hôtel.
S’est-elle ouverte facilement?
Donnatella est très à l’aise avec son identité et ne semblait rien cacher à l’appareil photo. J’ai trouvé cela admirable pour quelqu’un dans une situation, en apparence, de vulnérabilité. En m’autorisant simplement à photographier un rituel aussi intime, elle s’est confiée au-delà de ce que les mots auraient pu faire.
Le milieu Drag Queen est un sujet très large, pourquoi ne pas avoir fait un long reportage mais un sujet sur une très court durée?
Pour moi, ce projet est une exploration des moments d’entre-deux, les limbes dans lesquelles on se retrouve tous lorsque qu’on construit notre idée de « soi », même au-delà du genre. Cette série n’est pas sur la performance mais sur la transformation qui s’opère entre les scènes, et qui n’est normalement pas destinée à être vue. Je prévois de continuer ce projet l’année prochaine, de photographier les rituels de transformation d’autres « performers » pour « devenir » leur être de scène.
La chronologie de cette série est très forte, le titre est « Becoming Donnatella » (-ing signifiant « en train de » en anglais). La question du genre est-elle située dans cet entre-deux de la transformation de Donnatella?
La question du genre est extrêmement compliquée et ce n’était pas mon intention d’y répondre à travers ces photographies. Cependant, il y a des questions qui se posent dans ces images. Regarde-t-on un homme ou bien une femme? A quel moment la transformation de l’un à l’autre a-t-elle lieu? Est-ce que se maquiller et porter une poitrine est un acte féministe ou au contraire, cela ne réaffirme-t-il pas simplement l’idée que la féminité est définie par du rouge à lèvre et des talons hauts? Je ne cherche pas à répondre à ces questions. Mais j’aime le sentiment qu’elle puisse troubler le spectateur et l’interroger.
En savoir plus sur Kate Kornberg:
- Elle vit et travaille à Paris
- Diplômée du Brooklyn’s Pratt institute en photographie.
- Son site internet:katekornberg.com